La magistrate chargée d’éclaircir les circonstances de la mort de Zineb Redouane, atteinte par une grenade tirée par la police début décembre à Marseille, en marge d’une manifestation des Gilets jaunes, a demandé aux experts de déterminer l’incapacité totale de travail de la victime rapporte le parisien.

Cette Marseillaise de 80 ans est morte le 2 décembre dernier, après avoir reçu la veille une grenade lacrymogène dans le visage lancée par la police, en marge d’un rassemblement des Gilets jaunes dans la cité phocéenne. Elle était en train de fermer ses volets dans son appartement du centre-ville lorsque le projectile l’a atteinte. Des plots de grenade ont été retrouvés chez elle.

Or, dans les questions qu’elle adresse aux experts médicaux et balistiques qu’elle a missionnés le 10 décembre, la juge d’instruction en charge de l’information judiciaire ouverte pour « recherche des causes de la mort » leur demande de « préciser les lésions corporelles occasionnées et déterminer l’ITT » (incapacité totale de travail). En clair, la juge demande aux experts d’évaluer le préjudice corporel d’une… défunte.

Cet impair renforce encore davantage la méfiance de la famille de Zineb Redouane, échaudée par les premières déclarations du procureur de la République de Marseille. Au lendemain du drame, Xavier Tarabeux avait indiqué que « le décès résulte d’un choc opératoire et non d’un choc facial », ajoutant qu’« à ce stade, on ne peut pas établir de lien de cause à effet entre la blessure et le décès ».

Si l’autopsie de l’octogénaire révèle « un état général très altéré » et un décès survenu « au cours de l’induction d’anesthésie pour intervention médicale en urgence », elle fait également état d’un « traumatisme facial sévère, avec fractures de l’ensemble de l’hémiface droite ».

Il est donc très clair, dès le départ, que Zineb Redouane a reçu une grenade au visage. Et que c’est bien entendu à cause de ce traumatisme qu’elle a dû être opérée en urgence

, confiait au journal le Parisien il y a peu Me Yassine Bouzrou, l’avocat de la famille.

L’avocat, qui a porté plainte pour « violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner », avait déjà demandé le dépaysement de l’enquête. La découverte des questions posées par la juge d’instruction motive à nouveau sa démarche.
Une telle demande ne peut s’expliquer que par le fait que le magistrat instructeur ait estimé dès le début de l’information judiciaire que le traumatisme facial causé par la grenade lacrymogène n’avait aucun lien avec le décès de Madame Zineb Redouane.
Dans la mesure où l’instruction a justement pour objet de déterminer les causes du décès de Madame Redouane et notamment d’établir un lien de causalité entre le tir de grenade et le décès de Madame Redouane, une telle demande du magistrat instructeur est inadmissible
, écrit le pénaliste dans un courrier adressé le 23 avril au procureur général d’Aix-en-Provence dont nous avons pris connaissance ,rapporte le Parisien .
Me Bouzrou met en doute dans ce courrier « les garanties d’impartialité » présentées par la juge et réitère sa demande de dépaysement.

Des essais pour déterminer les circonstances

Sur le fond, dans cette ordonnance de commission d’experts adressée à un ingénieur balistique du laboratoire de police scientifique d’Ecully (Rhône) et à un médecin, la magistrate demande de « procéder à tout essai utile pour déterminer la distance, la trajectoire et la précision du tir », ainsi que de « fournir tout élément quant à l’état, au fonctionnement et au maniement de l’arme, et dire si elle a été utilisée conformément aux règles d’utilisation ». Le rapport détaillé devait initialement être remis le 11 mars. Sa rédaction a semble-t-il pris du retard.

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