L’Indonésie apporte son aide à Gaza, mais seulement après l’accord d’Israël

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Un membre de l’équipage vérifie les sangles assurant la sécurité de l’aide humanitaire destinée aux Palestiniens de Gaza à bord de deux avions Hercules C-130 depuis la base aérienne Halim Perdanakusuma à Jakarta, le 13 août 2025.

Lorsque deux avions C-130 Hercules indonésiens ont décollé d’une base jordanienne à la mi-août pour larguer des colis d’aide sur Gaza, The Times of Israel a rapporté : « Le bureau du Premier ministre a accordé une autorisation spéciale à l’Indonésie pour larguer une aide humanitaire dans la bande de Gaza. » Une autorisation spéciale. Même si l’Indonésie célébrait le courage de ses pilotes et la générosité de son peuple, la réalité était crue : rien pour Gaza ne se fait sans l’accord du génocidaire.

L’Indonésie le pays musulman le plus peuplé du monde, sans relations diplomatiques avec Israël ne pouvait nourrir les Palestiniens affamés que parce que le bureau de Benjamin Netanyahu l’autorisait. Comme si l’aide humanitaire n’était pas un droit, mais une faveur. Un officiel israélien a même déclaré : « Le Premier ministre Netanyahu invite tous les pays souhaitant larguer de la nourriture à Gaza à participer à l’effort humanitaire. » En d’autres termes : vous devez demander. Vous devez attendre une autorisation spéciale.

En effet, l’Indonésie a intensifié ses vols dans les jours suivants. Trois avions Hercules numéros A-1339, A-1344 et A-1343 ont livré 91,4 tonnes d’aide réparties en 520 colis. D’autres vols sont prévus depuis l’Égypte en septembre. Mais derrière chaque mission se cache la même humiliation : chaque parachute dépend d’une autorisation.

Sur le terrain, l’Agence nationale des aumônes d’Indonésie (Badan Amil Zakat Nasional, ou Baznas) a mobilisé des ressources exceptionnelles. Elle a déjà envoyé 150 milliards de roupies (9 millions de dollars) pour Gaza et détient 230 milliards supplémentaires (14 millions de dollars) en réserve, visant un total de 500 milliards (30 millions de dollars). Ces fonds doivent servir à construire hôpitaux, écoles et infrastructures vitales une fois Gaza plus calme. Baznas a coordonné avec l’armée indonésienne pour livrer 80 tonnes d’aide par voie aérienne depuis la Jordanie et dispose de plus de 700 tonnes stockées en Égypte, prêtes à être acheminées. Mais encore une fois, bien que cela ne soit peut-être pas largement rapporté, l’entrée de cette aide humanitaire semble dépendre de l’autorisation du génocidaire.

Considérons l’indignité : des sommes considérables de zakat aumône islamique collectée auprès des citoyens indonésiens et des centaines de tonnes de fournitures vitales existent, mais leur livraison à Gaza n’est jamais garantie. Ce qui devrait être un acte humanitaire simple est réduit à un privilège, conditionné par l’autorisation de la puissance qui assiège Gaza. Cette dépendance ôte toute dignité à l’action humanitaire. L’Indonésie peut être fière de sa générosité et du courage de ses pilotes. Pourtant, chaque sac de riz, chaque carton de médicaments, chaque parachute dans le ciel porte la même marque : « Autorisation spéciale du génocidaire. » Le peuple de Gaza n’est nourri que lorsque son oppresseur l’accepte.

Les missions d’aide indonésiennes révèlent plus que de la compassion : elles exposent la mort du prétendu « processus à deux États ». Pendant des décennies, la diplomatie de Jakarta a répété le mantra des « deux États vivant côte à côte en paix ». Mais Gaza aujourd’hui n’est pas un État. C’est une prison. Son espace aérien, ses frontières, son électricité, son eau et même son aide humanitaire sont contrôlés par un régime d’autorisations spéciales.

La Cisjordanie n’est pas différente : fragmentée en enclaves, encerclée par des colonies et des zones militaires. Jérusalem-Est est progressivement effacée. Prétendre qu’un État palestinien est à portée de main, c’est perpétuer une fiction qui rassure Israël et ses alliés mais condamne les Palestiniens à la subjugation permanente.

L’Indonésie, parmi toutes les nations, devrait le voir clairement. Son indépendance a été conquise contre des plans de partition coloniale visant à la maintenir faible et divisée. Les Indonésiens ont jadis refusé de se contenter de demi-libertés. Pourquoi les Palestiniens devraient-ils accepter cela maintenant ?

Certains diront que l’égalité dans un État unique est irréaliste ou dangereuse. Mais ce qui est vraiment irréaliste, c’est d’imaginer qu’Israël permettra un véritable État palestinien alors qu’il détient toutes les clés. Ce qui est dangereux, c’est de s’accrocher à un cadre mort qui masque l’apartheid sous couvert de diplomatie.

La solidarité indonésienne est réelle dans la zakat, dans les milliards de roupies mobilisés, dans les Hercules volant à travers les frontières. Mais ne confondons pas autorisations avec souveraineté, ou colis parachutés avec justice. Tant que les Palestiniens ne peuvent manger que lorsque le génocidaire l’accepte, aucune aide ne changera la vérité fondamentale : le problème n’est pas logistique, il est de pouvoir.

Le choix qui s’offre au monde n’est pas deux États contre un. Ce mirage a disparu. Le choix est apartheid ou égalité. Et l’Indonésie, avec son histoire anticoloniale et son poids moral dans le monde, devrait avoir le courage de le dire : la justice ne peut dépendre d’aucune autorisation spéciale.

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