Dans la commune de Sainte-Foy-lès-Lyon, de nombreux courriers à caractère islamophobe ont été adressés à des familles maghrébines, habitants dans les logements du quartier de la Gravière, composé pour moitié d’HLM.
Dessins, poèmes, textes xénophobes et islamophobes, les lettres visaient en majeure partie les habitants de ce quartier populaire. Le hic ? Ces courriers leur étaient adressés personnellement. Cette mascarade a suscité de nombreux questionnements : comment les auteurs ont-ils réussi à s’emparer des adresses ainsi que des noms de tous les habitants ?

Les courriers ont été envoyés en grand nombre dans des enveloppes pré timbrées, avec les adresses tapées à l’ordinateur. Par conséquent, les insultes n’ont pas été distribuées dans les boîtes aux lettres par simple coïncidence…

Dans certaines enveloppes on pouvait notamment trouver : une photo islamophobe extraite du site « Riposte Laïque » ou un dessin d’un lutin faisant un doigt d’honneur. Les auteurs de ces lettres n’étaient sûrement pas dotés d’un niveau intellectuel très élevé puisque les messages se résumaient à associer « musulman » avec « racailles », « immigrés » ainsi que « Maghrébin ».

« On vous donne un toit, de la nourriture, de l’argent, on vous inscrit à l’école pour apprendre la langue (…) vous touchez plus d’indemnités que NOUS sans jamais rien faire ! » ; « Ni voile, ni burqa, l’islam ne passera pas. » Voilà le type de message remplit d’amalgames qu’on pouvait notamment relever dans le contenu de ces enveloppes.

C’est un sentiment de haine et de crainte qui s’est installé dans ce quartier situé dans le Rhône. Les mots qui qualifient cette attitude ? Pour Abderahouf Ait-Abdelkader, conducteur de locomotive, il s’agit d’un acte « dégueulasse » et « insultant ».
« Au départ, j’étais tellement sous le choc que je ne comptais pas en parler à ma femme. J’ai trois enfants. L’aîné a 10 ans. Je n’ai pas voulu qu’ils soient au courant. Je leur ai caché. J’ai peur qu’on s’en prenne à eux » se confie le père de famille. Il a décidé de porter plainte pour incitation à la haine raciale. Un autre habitant du quartier désirait témoigner sous sa véritable identité : Samir Mekkaoui, père de famille également et locataire d’un immeuble voisin depuis novembre dernier : « Je n’ai jamais vu ça. Ça nous a profondément blessés. J’ai immédiatement pensé à mes enfants qui jouent dehors dans le parc. J’ai eu peur ».

Quand bien même certaines victimes ont changé de nom de famille, elles ont également fait partie du lot. Prenons le cas de Samia, mariée à un homme d’origine italienne. Elle s’interroge : « soit ils ont eu nos coordonnées exactes, soit ils ont pu savoir que j’étais bien Maghrébine alors que j’ai un nom à consonance italienne ».
En effet, le ou les auteurs a/ont probablement eu accès à un listing officiel d’adresses qui comportent le nom de jeune fille de Samia. Tout comme Fadia, qui a décidé de se confier sous un nom d’emprunt. Mariée à un Européen, elle ne porte plus un nom « à consonance maghrébine ». Quant à son prénom, il n’apparaît pas sur sa boîte aux lettres ni sur l’interphone : un procédé rusé, tordu et presque inexplicable.

Du côté de certains organismes, c’est la stupéfaction générale. Patrick Khan, représentant régional de la Licra (Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme) a souhaité réagir à cette injustice: « On n’a pas conscience du mal que ce genre de lettres anonymes peut produire. C’est d’une extrême violence » ajoutant que dans la région lyonnaise : « depuis plusieurs mois, cette pratique se développe. On a notamment eu connaissance de courriers “anti-arabes” à la fin de l’année dernière. »
La Licra a d’ailleurs écrit au procureur de la république, au préfet et au maire de la commune concernée par les courriers.

Véronique Sarselli, maire UMP, a été mise au courant de l’affaire par plusieurs habitants et affirme prendre cette affaire « très au sérieux ». Elle indique être « scandalisée et inquiète quant à la montée du racisme et de l’intolérance qu’ils révèlent ». Elle ajoute : « J’imagine l’état de détresse des personnes qui ont reçu ces courriers. C’est gravissime. »

Une enquête est ouverte. La nouvelle maire de la commune a fait savoir que sur 32 personnes visées, (portant tous des noms à consonance maghrébine) seuls 16 individus ont porté plainte.

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