Racisme - Le brigadier Amar Benmohamed, lanceur d'alerte sanctionné

Jusqu’à son témoignage en 2020, Amar Benmohamed était un brigadier-chef sans histoires. Dans Envoyé spécial, il raconte ce qu’il a vu et dénoncé : des insultes racistes et des maltraitances envers les détenus du palais de justice de Paris.

Le policier qui a dénoncé le racisme et la maltraitance de certains de ses collègues envers des détenus du dépôt du tribunal de Paris a reçu un “avertissement” pour avoir tardé à faire un rapport à sa hiérarchie, a-t-on appris ce mardi 12 janvier auprès de son avocat.

 

“On sanctionne ceux qui révèlent le racisme. Nous allons déposer un recours contre cet avertissement auprès du tribunal administratif”, a réagi auprès de l’AFP l’avocat d’Amar Benmohamed, Arié Alimi, dénonçant “une volonté d’empêcher le combat contre le racisme dans la police”.

Un rapport écrit en mars 2019

Ces révélations ont conduit à l’ouverture d’une enquête préliminaire par le parquet de Paris, mardi 28 juillet, des chefs de «violences volontaires par personnes dépositaires de l’autorité publique», «injures publiques en raison de l’origine, l’ethnie, la nation, la race ou la religion» et «injures publiques en raison du sexe et de l’orientation sexuelle».

Avant de rendre l’affaire publique, Amar Benmohamed avait écrit, en mars 2019, un rapport sur les faits évoqués ci-dessus. Celui-ci avait ensuite été transmis à l’Inspection générale de la police nationale (IGPN), qui a ouvert une enquête administrative. Au terme de cette enquête, transmise à la préfecture de police de Paris en février 2020, les enquêteurs avaient confirmé une partie des allégations d’Amar Benmohamed et proposé un conseil de discipline pour un des agents, et des sanctions disciplinaires pour d’autres.

Amar Benmohammed témoigne

Humiliations, insultes racistes ou homophobes, privations de nourritures ou d’eau, refus de soins médicaux… Le brigadier-chef Amar Benmohamed révèle sur le site d’informations StreetPress l’existence d’un vaste système de maltraitance dans les cellules du tribunal de Paris, « le plus grand tribunal d’Europe où chaque jour se pressent près de 9 000 personnes »

« Au total, sur un peu plus de deux ans, plus de mille prévenus ont été maltraités. C’est même sans doute plus », dénonce le brigadier-chef Benmohamed, qui est délégué syndical chez Unité SGP-Police.

Aux insultes racistes récurrentes : « ferme ta gueule, sale bougnoule », « nègro », « sale race », « je te lancerais tout ça dans la Seine », « si on me laissait faire, je mettrais le feu à toutes ces merguez », s’ajoutent, selon Amar Benmohamed, certains faits pour lesquels « on peut presque parler de torture », avec des privations d’eau et de nourriture, qui sont « monnaie courante ».

« Si je parle aujourd’hui, c’est parce que j’ai tout fait [à l’intérieur de la police] pour régler cette affaire et ça a échoué »

Cette décision d’aller au bout de cette bataille, il l’a prise dans la nuit du 11 au 12 mars 2019. Ce jour-là, une gardienne de la paix en poste dans les sous-sols du tribunal, interpelle vertement un détenu qui demande un repas sans porc, rapporte StreetPress :

« Tu prendras ce qu’on te donnera. On en a marre des bougnoules, c’est eux qui nous font chier en France. »

Amar Benmohamed note une augmentation des incidents avec les détenus. Il décide alors de s’intéresser à ces nouveaux d’un peu plus près. Ce qu’il découvre au fil des mois est sidérant. Les insultes racistes, par dizaines. « Ferme ta gueule, sale bougnoule »« nègro »« sale race ».

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